Bible in 90 Days
Le jour du repos
15 A la même époque, je remarquai en Juda des gens qui, un jour de sabbat, foulaient du raisin au pressoir, d’autres qui rentraient des gerbes, les chargeaient sur des ânes et transportaient du vin, des raisins, des figues et toutes sortes d’autres fardeaux pour les amener à Jérusalem en plein jour du repos. Je leur fis des reproches le jour où ils vendaient leurs marchandises[a]. 16 Il y avait aussi des gens de Tyr qui s’étaient installés à Jérusalem. Ils y faisaient venir du poisson et toutes sortes d’autres marchandises pour les vendre aux Judéens et à Jérusalem le jour du sabbat. 17 Je fis des reproches aux notables de Juda et je leur dis : Comment pouvez-vous laisser faire un si grand mal et profaner ainsi le jour du sabbat ! 18 C’est exactement ainsi que vos ancêtres ont agi, et c’est bien à cause de cela que notre Dieu a fait venir tous ces malheurs sur nous et sur cette ville. Et vous, par votre manque de respect du jour du sabbat, vous allez encore aggraver sa colère contre Israël !
19 Puis je donnai ordre de fermer les portes de Jérusalem dès la tombée de la nuit, avant le début du jour du sabbat et j’interdis de les rouvrir avant que ce jour soit passé. Je postai quelques-uns de mes serviteurs à proximité des portes pour veiller à ce qu’aucun fardeau ne soit introduit le jour du sabbat. 20 Alors les commerçants et les marchands de toutes sortes de produits passèrent plusieurs fois la nuit à l’extérieur de Jérusalem. 21 Je les avertis en ces termes : Pourquoi établissez-vous votre campement devant la muraille ? Si vous recommencez, je vous ferai arrêter.
Depuis ce jour-là, ils cessèrent de venir pendant le jour du sabbat. 22 Puis j’ordonnai aux lévites d’accomplir les rites de purification et de venir surveiller les portes pour que le caractère sacré du jour du sabbat soit respecté.
De cela aussi, souviens-toi en ma faveur, ô mon Dieu, et fais-moi grâce dans ton immense bonté.
Les mariages mixtes
23 A cette même époque, je constatai également que des Judéens avaient épousé des femmes ashdodiennes, ammonites et moabites[b]. 24 La moitié de leurs fils parlaient l’ashdodien et aucun ne savait la langue des Juifs ; ils ne connaissaient que celle de tel ou tel peuple. 25 Je pris ces compatriotes à partie et j’appelai la malédiction sur eux ; je battis même quelques-uns d’entre eux et je leur arrachai les cheveux, puis je leur fis prêter serment au nom de Dieu en disant : Vous ne donnerez pas vos filles à des fils d’étrangers et vous ne prendrez leurs filles ni pour vos fils, ni pour vous-mêmes[c]. 26 N’est-ce pas précisément ce genre d’unions qui a entraîné Salomon, roi d’Israël, dans le péché, lui qui n’avait pas son pareil parmi les rois des grandes nations étrangères, qui était aimé de son Dieu[d] et que Dieu avait établi roi sur tout Israël ? Et pourtant, même lui fut entraîné dans le péché par les femmes étrangères[e].
27 Faut-il donc entendre dire de vous que vous commettez ce grand mal et que vous êtes infidèles à notre Dieu en épousant des femmes étrangères ?
28 Un des fils de Yoyada et petit-fils d’Eliashib, le grand-prêtre, était devenu le gendre de Sanballat, le Horonite. C’est pourquoi je le chassai loin de moi.
29 Souviens-toi de ces gens, ô mon Dieu, qui ont déshonoré la fonction sacerdotale et ton alliance avec les prêtres et les lévites.
Conclusion
30 Je les purifiai donc de tout élément étranger et je remis en vigueur les règlements que devaient observer les prêtres et les lévites, chacun dans son service. 31 Je rétablis aussi les offrandes de bois à fournir aux dates prescrites et celles des premiers produits de la terre.
Souviens-toi favorablement de moi, ô mon Dieu !
Le banquet de l’empereur
1 Cette histoire se passait du temps de Xerxès[f], celui dont l’empire s’étendait depuis l’Inde jusqu’à l’Ethiopie et comprenait cent vingt-sept districts[g]. 2 En ce temps-là, quand l’empereur Xerxès vint prendre place sur son trône impérial[h] dans la citadelle de Suse[i], 3 la troisième année de son règne, il organisa un grand festin pour tous ses ministres, ses hauts fonctionnaires, les officiers de l’armée des Perses et des Mèdes, ainsi que pour les nobles et les gouverneurs des provinces. 4 Il voulait montrer devant eux la richesse et la gloire de son règne et la splendeur de sa grande magnificence. Les festivités durèrent très longtemps ; cent quatre-vingts jours.
5 A la fin de cette période, l’empereur offrit à toute la population de Suse, riches ou pauvres, un banquet qui eut lieu pendant sept jours dans les jardins du palais impérial. 6 Des tentures de lin blanches et bleu ciel étaient fixées à des colonnes de marbre par des cordelières blanches et pourpres passées dans des anneaux d’argent. Des divans[j] d’or et d’argent étaient disposés sur des dallages de mosaïques faits avec du porphyre, du marbre, de la nacre et de l’agathe. 7 On servait des boissons dans des coupes d’or, toutes différentes de formes ; le vin de l’empereur coulait avec une générosité tout impériale. 8 Il avait été ordonné que chacun puisse boire à volonté sans aucune contrainte, car l’empereur avait donné des instructions à tous les intendants du palais pour qu’ils satisfassent les désirs de chacun de ses hôtes. 9 L’impératrice Vasthi organisa de son côté un banquet pour les femmes dans le palais de l’empereur Xerxès.
La désobéissance de l’impératrice Vasthi et sa disgrâce
10 Le septième jour du banquet, comme l’empereur était égayé par le vin, il ordonna aux sept eunuques spécialement attachés à son service : Mehoumân, Biztha, Harbona, Bigtha, Abagtha, Zéthar et Karkas, 11 de faire venir l’impératrice Vasthi en sa présence, couronnée du diadème impérial. Il voulait montrer aux hommes de tous les peuples rassemblés et aux ministres combien elle était belle, car elle était effectivement d’une beauté remarquable. 12 Les eunuques transmirent à l’impératrice Vasthi l’ordre de l’empereur, mais elle refusa d’aller se présenter devant lui. Celui-ci en fut vivement irrité et se mit dans une violente colère. 13 Puis il consulta les conseillers connaissant les usages, car les affaires impériales étaient toujours discutées avec tous les experts légaux et juridiques. 14 Ses plus proches conseillers étaient Karshena, Shétar, Admata, Tarsis, Mérès, Marsena, Memoukân, les sept ministres des Perses et des Mèdes ; ils faisaient partie du conseil impérial et occupaient les postes les plus élevés dans l’empire. 15 L’empereur leur demanda comment la loi requérait que l’on traite l’impératrice Vasthi pour n’avoir pas obéi à l’ordre de l’empereur Xerxès que les eunuques lui avaient transmis.
16 Memoukân déclara à l’empereur en présence de ses hauts fonctionnaires : L’impératrice Vasthi ne s’est pas seulement rendue coupable envers l’empereur, mais aussi envers tous ses ministres et tous les gens du peuple de toutes les provinces de l’empire de Xerxès. 17 Car ce qu’elle a fait sera connu de toutes les femmes et les incitera à mépriser l’autorité de leurs maris. Elles pourront dire : « L’empereur Xerxès avait ordonné de faire venir l’impératrice Vasthi en sa présence, et elle n’est pas venue. » 18 Aujourd’hui même, les femmes des ministres perses et mèdes apprendront comment l’impératrice s’est conduite et elles se permettront de répliquer sur le même ton à leurs maris, ministres de l’empereur, et leur mépris entraînera la colère de leurs maris. 19 Si donc tel est le bon plaisir de l’empereur, qu’il fasse promulguer une ordonnance impériale irrévocable, consignée dans les lois de Perse et de Médie, interdisant pour toujours à Vasthi de se présenter devant l’empereur Xerxès, et stipulant que l’empereur conférera le titre d’impératrice à l’une de ses semblables plus digne qu’elle. 20 Lorsque ce décret, publié par l’empereur dans tout son vaste empire, sera connu partout, toutes les femmes témoigneront du respect à leurs maris, quelle que soit leur condition sociale.
21 Cette déclaration plut à l’empereur et aux ministres, et l’empereur suivit le conseil de Memoukân. 22 Il expédia des lettres dans toutes les provinces de l’empire, rédigées pour chaque province selon son système d’écriture et dans la langue de sa population, ordonnant que tout homme soit maître en sa maison et y impose l’usage de sa langue maternelle[k].
Le choix d’une nouvelle impératrice
2 Au bout d’un certain temps, la colère de l’empereur Xerxès se calma. Il repensa à ce qu’avait fait Vasthi, et il réfléchit à la décision qui avait été prise à son sujet. 2 Alors les courtisans attachés à son service lui dirent : Que l’on recherche pour l’empereur des jeunes filles vierges et belles. 3 Que l’empereur désigne donc des fonctionnaires chargés de sélectionner dans toutes les provinces de son empire toutes les jeunes filles vierges et belles et de les amener dans le harem de la citadelle de Suse pour les confier à Hégué, l’eunuque de l’empereur qui a la garde des femmes. On leur fournira tous les produits de beauté nécessaires. 4 La jeune fille qui aura la préférence de l’empereur succédera comme impératrice à Vasthi.
Cette proposition plut à l’empereur qui la fit mettre à exécution.
5 Or, dans la citadelle de Suse, vivait un Juif nommé Mardochée[l]. Il était fils de Yaïr, et descendant de Shimeï et de Qish de la tribu de Benjamin. 6 Sa famille[m] avait été déportée de Jérusalem avec les autres exilés emmenés par Nabuchodonosor, roi de Babylone, en même temps que Yekonia[n], roi de Juda. 7 Mardochée avait élevé sa cousine Hadassa – c’est-à-dire Esther[o] – orpheline de père et de mère. Cette jeune fille était bien faite et d’une grande beauté. A la mort de ses parents, Mardochée l’avait adoptée comme sa fille.
Esther au palais impérial
8 Après la proclamation de l’ordonnance de l’empereur et de son décret, de nombreuses jeunes filles furent rassemblées dans la citadelle de Suse, sous la surveillance de Hégué. Esther fut aussi emmenée au palais impérial et confiée aux soins de Hégué, le responsable du harem. 9 La jeune fille lui plut et gagna sa faveur. Il se mit en peine de lui fournir tout ce qu’il fallait en produits de beauté et pour son régime. Il mit à sa disposition sept jeunes servantes, sélectionnées parmi le personnel du palais impérial, et il la transféra, elle et ses servantes, dans le meilleur appartement du harem. 10 Esther n’avait révélé ni son peuple ni sa famille d’origine, car Mardochée le lui avait interdit. 11 Chaque jour, il se rendait devant la cour du harem pour prendre des nouvelles d’Esther et savoir comment on la traitait.
12 Les jeunes filles se rendaient chacune à son tour chez l’empereur Xerxès, au terme du traitement de beauté prescrit pour douze mois par le protocole des femmes. Pour ce traitement, on utilisait pendant six mois de l’huile de myrrhe, et pendant six autres mois des baumes aromatiques et divers produits de beauté employés par les femmes. 13 Puis, lorsque venait le tour d’une jeune fille de se rendre chez l’empereur, on lui donnait tout ce qu’elle demandait pour emporter du harem au palais impérial. 14 Elle s’y rendait le soir, et le lendemain matin, elle était conduite dans un second harem et confiée à la responsabilité de Shashgaz, l’eunuque de l’empereur chargé de la garde des épouses de second rang. Elle ne retournait plus chez l’empereur, à moins que celui-ci en manifeste le désir et la fasse appeler par son nom.
Esther, nouvelle impératrice
15 Quand vint son tour d’aller chez l’empereur, Esther, fille d’Abichaïl, oncle de Mardochée, qui l’avait adoptée comme sa fille, elle ne demanda rien d’autre que ce qu’avait indiqué Hégué, l’eunuque de l’empereur, gardien des femmes. Elle gagnait la faveur de tous ceux qui la voyaient. 16 C’est le dixième mois, c’est-à-dire au mois de Tébeth de la septième année du règne[p], que l’on vint prendre Esther pour l’emmener chez l’empereur au palais impérial. 17 L’empereur aima Esther plus que toutes les autres femmes et elle gagna sa faveur et sa bienveillance mieux que toutes les autres jeunes filles. Alors il mit sur sa tête la couronne impériale et la fit proclamer impératrice à la place de Vasthi. 18 En son honneur, il organisa un grand banquet pour tous ses ministres et ses hauts fonctionnaires. Ce fut le « banquet d’Esther ». Il accorda aux provinces des allègements d’impôts et distribua des cadeaux avec une générosité impériale.
Mardochée sauve la vie de l’empereur
19 Lorsque avait eu lieu le second ramassage de jeunes filles, Mardochée avait un poste au palais impérial. 20 Esther avait tenu secrète son origine familiale et sa nationalité, comme le lui avait ordonné Mardochée. Elle continuait à se conformer à ses instructions comme au temps où elle était encore sous sa tutelle.
21 A cette époque, alors que Mardochée exerçait donc des fonctions au palais impérial, deux eunuques de l’empereur, Bigtân et Téresh, qui faisaient partie de la garde postée à l’entrée du palais, furent exaspérés par l’empereur Xerxès et cherchèrent à l’assassiner. 22 Mardochée en eut connaissance et il en avertit l’impératrice Esther qui mit l’empereur au courant de la part de Mardochée. 23 Après enquête, l’information se révéla exacte. Les deux coupables furent pendus à une potence et l’affaire fut consignée dans le livre des Annales[q] en présence de l’empereur.
Mardochée met Haman en colère
3 Quelque temps après ces événements, l’empereur Xerxès éleva en dignité Haman, fils de Hammedata du pays d’Agag : il le promut au rang de premier ministre et lui donna ainsi la prééminence sur tous les ministres de son gouvernement. 2 Par ordre de l’empereur, tous les fonctionnaires impériaux en poste au palais devaient s’agenouiller et se prosterner sur son passage. Mais Mardochée ne s’agenouillait pas et ne se prosternait pas devant lui. 3 Ses collègues lui demandèrent : Pourquoi désobéis-tu à l’ordre de l’empereur ?
4 Tous les jours, ils lui disaient cela, mais Mardochée ne les écoutait pas.
Finalement, ils signalèrent la chose à Haman pour voir si Mardochée s’en tiendrait à ses paroles, car il leur avait dit qu’il était Juif. 5 Quand Haman eut constaté que Mardochée ne s’agenouillait pas et ne se prosternait pas devant lui, il devint furieux. 6 On lui avait appris à quel peuple Mardochée appartenait, et il jugea trop insuffisant de porter la main sur Mardochée seulement. Il résolut donc d’exterminer tous les Juifs, compatriotes de Mardochée, qui se trouvaient dans tout l’empire de Xerxès. 7 Le premier mois, c’est-à-dire le mois de Nisân de la douzième année du règne de Xerxès[r], Haman fit tirer au sort – ce qui se dit « Pour » – en passant en revue un jour après l’autre et un mois après l’autre. Le sort tomba sur le douzième mois qui est le mois d’Adar[s].
Haman veut exterminer les Juifs
8 Puis Haman alla dire à l’empereur Xerxès : Il y a, répandu parmi les peuples dans toutes les provinces de ton empire, un peuple qui est inassimilable. Leurs lois sont différentes de celles de tous les autres peuples, et ils n’obéissent pas aux lois impériales. L’empereur n’a aucun intérêt à les laisser en paix. 9 Si l’empereur le veut bien, que l’on rédige un édit ordonnant leur extermination et je pèserai dix mille pièces d’argent que je remettrai aux fonctionnaires impériaux pour qu’ils les versent dans les caisses de l’empereur.
10 Alors l’empereur ôta son anneau du doigt et le remit à Haman, fils de Hammedata d’Agag, l’ennemi des Juifs[t]. 11 Puis l’empereur dit à Haman : Je te laisse l’argent et je te livre ce peuple. Fais-en ce que tu voudras.
12 Le treizième jour du premier mois[u], on convoqua les secrétaires impériaux et, sur l’ordre de Haman, ils écrivirent aux satrapes de l’empereur[v], aux gouverneurs de chaque district et aux ministres de chaque peuple. Les documents furent rédigés selon le système d’écriture des différentes provinces et dans la langue de chaque peuple. Les messages furent écrits au nom de l’empereur Xerxès et scellés du sceau impérial. 13 Les lettres furent portées par les coureurs dans toutes les provinces de l’empire, pour ordonner de massacrer, de tuer et d’exterminer les Juifs, jeunes et vieux, enfants et femmes, en un seul jour, à savoir le treizième jour du douzième mois, qui est le mois d’Adar, et de piller leurs biens. 14 Le texte de l’édit devait être promulgué comme loi dans chaque province et porté à la connaissance de tous les peuples pour que chacun se tienne prêt pour le jour fixé.
15 Les coureurs partirent en hâte, par ordre de l’empereur. Le décret fut aussi publié dans la citadelle de Suse. L’empereur et Haman s’installèrent pour boire tandis que dans la ville de Suse régnait la consternation.
Mardochée demande à Esther d’intervenir
4 Lorsque Mardochée apprit tout ce qui s’était passé, il déchira ses vêtements, se couvrit d’un habit de toile de sac et répandit de la cendre sur lui. C’est ainsi qu’il parcourut la ville en poussant de grands cris de douleur. 2 Puis il alla jusque devant la porte du palais impérial, par laquelle personne n’avait le droit d’entrer revêtu d’un habit de toile de sac.
3 Dans chaque province, à mesure qu’y parvenaient l’ordonnance et le décret de l’empereur, c’était comme un deuil qui frappait les Juifs ; ils se mettaient à jeûner, à pleurer et à pousser des cris : beaucoup se couchaient sur des toiles de sac et de la cendre[w].
4 Les servantes d’Esther et ses eunuques vinrent la mettre au courant, et l’impératrice en fut toute bouleversée. Elle envoya des vêtements à Mardochée, pour qu’il s’habille correctement et enlève l’habit de toile de sac qu’il portait. Mais il les refusa. 5 Alors Esther appela Hathac, l’un des eunuques que l’empereur avait mis à son service, et le chargea de s’enquérir auprès de Mardochée de ce qui se passait et qui le poussait à agir ainsi. 6 Hathac alla trouver Mardochée qui se tenait toujours sur la place publique, devant la porte du palais impérial. 7 Mardochée l’informa de tout ce qui lui était arrivé et il lui dit notamment quelle quantité d’argent Haman avait promis de verser dans les coffres de l’empereur pour que l’on fasse périr tous les Juifs. 8 Il lui remit aussi une copie du texte de l’édit d’extermination qui avait été publié dans Suse pour qu’il la montre à Esther, l’informe de la situation et lui communique l’ordre de se rendre chez l’empereur afin d’implorer sa pitié et de le supplier en faveur de son peuple.
9 Hathac revint et rapporta à Esther les paroles de Mardochée. 10 Celle-ci ordonna à Hathac de rapporter sa réponse à Mardochée : 11 Tous les serviteurs de l’empereur ainsi que les habitants de toutes les provinces de l’empire savent bien qu’il y a une loi, qui est la même pour tous, en vertu de laquelle tout homme ou toute femme qui pénétrerait dans la cour intérieure du palais pour se rendre auprès de l’empereur sans avoir été convoqué par lui, sera mis à mort, sauf si l’empereur lui tend son sceptre d’or. Alors seulement sa vie lui sera épargnée. Quant à moi, voilà trente jours que je n’ai plus été invitée à me rendre chez l’empereur.
12 Lorsqu’on eut rapporté à Mardochée les paroles d’Esther, 13 il lui fit répondre : Ne t’imagine pas qu’étant dans le palais impérial, tu seras épargnée à la différence de tous les autres Juifs ! 14 Bien au contraire ! Car si tu persistes à garder le silence dans les circonstances présentes, le salut et la délivrance viendront d’ailleurs pour les Juifs[x], alors que toi et ta famille, vous périrez. D’ailleurs, qui sait si ce n’est pas en vue de telles circonstances que tu es devenue impératrice ?
15 Alors Esther fit porter cette réponse à Mardochée : 16 Va rassembler tous les Juifs qui se trouvent à Suse. Jeûnez pour moi, sans manger ni boire pendant trois jours et trois nuits. J’observerai de mon côté le même jeûne avec mes servantes. Ensuite, je me rendrai chez l’empereur, malgré la loi. Si je dois mourir, je mourrai !
17 Mardochée partit et fit ce qu’Esther lui avait commandé.
Esther invite l’empereur et Haman à un festin
5 Au bout du troisième jour de jeûne, Esther revêtit ses habits royaux et se tint dans la cour intérieure du palais impérial, en face des appartements de l’empereur. Celui-ci siégeait sur son trône dans le palais, en face de l’entrée de l’édifice. 2 Quand il aperçut l’impératrice Esther, qui se tenait dans la cour, il lui accorda sa faveur. Il lui tendit le sceptre d’or qu’il tenait en main. Esther s’approcha et en toucha l’extrémité. 3 Alors il lui demanda : Qu’y a-t-il, impératrice Esther ? Quelle est ta requête ? Elle te sera accordée, même si c’est la moitié de l’empire.
4 Esther lui répondit : Si l’empereur le veut bien, qu’il vienne ce soir avec Haman au festin que j’ai préparé en son honneur.
5 L’empereur dit : Dépêchez-vous de prévenir Haman pour que nous nous rendions à l’invitation d’Esther.
L’empereur et Haman vinrent au festin qu’Esther avait préparé. 6 Pendant que l’on buvait le vin, l’empereur dit à Esther : Quelle est donc ta requête, elle te sera accordée. Quelle est ta demande ? Même si c’est la moitié de l’empire, tu l’obtiendras.
7 Esther répondit : Ma requête, ma demande, la voici : 8 si l’empereur veut m’accorder sa faveur, et s’il veut bien accéder à ma requête et répondre à ma demande, que l’empereur vienne avec Haman au festin que je leur prépare demain. C’est alors que je répondrai à la question de l’empereur.
Haman fait dresser une potence pour Mardochée
9 Haman s’en retourna ce jour-là, joyeux et le cœur en fête. En passant devant la porte du palais impérial, il aperçut Mardochée. Celui-ci ne se leva pas et ne tremblait pas devant lui. Alors Haman fut rempli de fureur contre lui. 10 Néanmoins, il se domina et rentra chez lui. Là, il fit venir ses amis et sa femme Zéresh. 11 Il leur décrivit longuement ses richesses prestigieuses, leur parla de ses nombreux fils[y] et de tous les honneurs dont l’empereur l’avait comblé en l’élevant à un rang supérieur aux ministres et à tous les hauts fonctionnaires impériaux.
12 – Et même, ajouta-t-il, l’impératrice Esther n’a invité personne d’autre que moi avec l’empereur au festin qu’elle a préparé. Et demain, c’est encore moi qui suis invité avec l’empereur. 13 Mais tout cela ne compte pour rien à mes yeux, aussi longtemps que je verrai ce Juif Mardochée assis à la porte du palais impérial.
14 Sa femme Zéresh et tous ses amis lui dirent : Il n’y a qu’à faire dresser une potence haute de vingt-cinq mètres, et demain matin, tu parleras à l’empereur pour qu’on y pende Mardochée. Puis tu pourras aller gaiement au festin en compagnie de l’empereur.
Cette proposition plut à Haman, et il fit faire la potence.
Mardochée honoré par l’empereur
6 Cette nuit-là, comme l’empereur n’arrivait pas à trouver le sommeil, il se fit apporter le livre des Annales[z] relatant les événements passés et l’on en fit la lecture devant lui. 2 On tomba sur le passage racontant comment Mardochée avait prévenu que Bigtân et Téresh, deux eunuques de l’empereur qui faisaient partie de la garde postée à l’entrée du palais, complotaient de porter la main sur l’empereur Xerxès.
3 L’empereur demanda : De quelle manière a-t-on honoré Mardochée et quelle distinction lui a-t-on accordée pour cela ?
Les serviteurs qui étaient en fonction auprès de lui répondirent : On n’a rien fait pour lui.
4 L’empereur demanda alors : Qui est dans la cour ?
C’était justement Haman qui entrait dans la cour extérieure du palais impérial, pour demander à l’empereur que l’on pende Mardochée à la potence qu’il avait fait préparer pour lui. 5 Les serviteurs dirent à l’empereur : C’est Haman qui se tient dans la cour.
– Qu’il entre ! ordonna l’empereur.
6 Haman entra et l’empereur lui demanda : Que faut-il faire pour un homme que l’empereur désire honorer ?
En son for intérieur, Haman se dit : Quel homme l’empereur peut-il désirer honorer, sinon moi ?
7 Il répondit donc à l’empereur : Pour un homme que l’empereur désire honorer, 8 que l’on apporte un manteau de l’empereur que l’empereur a déjà porté, que l’on amène un des chevaux que l’empereur a montés, et que l’on pose sur la tête du cheval un diadème impérial[aa]. 9 Que l’on confie le manteau ainsi que le cheval à l’un des ministres de l’empereur, l’un des hauts dignitaires, et qu’on revête du manteau l’homme que l’empereur désire honorer, puis qu’on le fasse monter sur le cheval et qu’on le conduise ainsi sur la place de la ville en proclamant devant lui : « Voilà ce que l’empereur fait pour l’homme qu’il désire honorer ! »
10 Alors l’empereur dit à Haman : Dépêche-toi d’aller chercher le manteau et le cheval, comme tu l’as dit, et fais tout cela pour le Juif Mardochée, qui exerce des fonctions au palais ! N’omets rien de tout ce que tu as proposé !
11 Haman alla chercher le manteau et le cheval, il revêtit Mardochée du manteau, puis il le fit monter sur le cheval et le conduisit ainsi sur la grande place de la ville en proclamant devant lui : Voilà ce que l’empereur fait pour l’homme qu’il désire honorer !
12 Ensuite, tandis que Mardochée retournait à ses fonctions au palais impérial, Haman rentra précipitamment chez lui comme en deuil et en se couvrant le visage. 13 Il raconta à Zéresh sa femme et à tous ses amis ce qui venait de lui arriver. Ses conseillers et sa femme lui dirent : Si ce Mardochée devant qui tu as commencé à être humilié est Juif, tu ne pourras rien contre lui. Tu peux être certain que tu continueras à déchoir devant lui.
14 Ils étaient encore en train de s’entretenir avec lui quand survinrent les envoyés de l’empereur venus faire presser Haman de se rendre au festin[ab] préparé par Esther.
Esther présente sa requête
7 L’empereur et Haman arrivèrent donc pour festoyer avec l’impératrice Esther. 2 Ce deuxième jour, pendant que l’on buvait le vin, l’empereur demanda de nouveau à Esther : Dis-moi quelle est ta requête, impératrice Esther ? Elle te sera accordée. Quelle est ta demande ? Même si c’est la moitié de mon empire, tu l’obtiendras.
3 L’impératrice Esther répondit : Si l’empereur veut m’accorder une faveur, si l’empereur le veut bien, que la vie sauve me soit accordée, c’est là ma requête. Que la vie sauve soit aussi accordée à mon peuple, telle est ma demande. 4 En effet, moi et mon peuple, nous avons été livrés pour être massacrés, tués et exterminés. Si nous avions seulement été vendus[ac] comme esclaves et servantes, j’aurais gardé le silence ; car, dans ce cas, notre infortune ne vaudrait pas la peine que l’on importune l’empereur[ad].
5 Alors l’empereur Xerxès demanda à l’impératrice Esther : Qui est-il, celui qui a eu l’audace de concevoir un tel dessein ? Où est-il ?
6 Esther répondit : Le persécuteur, l’ennemi, c’est Haman, ce misérable !
Alors Haman fut épouvanté, devant l’empereur et l’impératrice. 7 Furieux, l’empereur laissa son vin, se leva et sortit dans le jardin du palais. Haman, voyant bien que, dans l’esprit de l’empereur, son malheur était décidé, resta là pour implorer l’impératrice Esther pour sa vie. 8 L’empereur revint du jardin à la salle du festin au moment où Haman se laissait tomber sur le divan où Esther était allongée. Du coup, l’empereur s’écria : Veut-il en plus faire violence à l’impératrice en ma présence dans mon palais ?
A peine l’empereur eut-il prononcé ces mots que l’on recouvrit la tête[ae] de Haman. 9 Harbona, l’un des eunuques, dit alors devant l’empereur : Il y a justement cette potence que Haman a fait faire pour Mardochée, qui a parlé pour le bien de l’empereur. Elle se trouve dans la cour de Haman et elle a vingt-cinq mètres de haut.
L’empereur ordonna : Qu’on l’y pende !
10 On pendit donc Haman à la potence qu’il avait préparée pour Mardochée. Alors la colère de l’empereur s’apaisa.
Le nouvel édit
8 Ce même jour, l’empereur Xerxès fit don à l’impératrice Esther de tous les biens de Haman[af], le persécuteur des Juifs, et Mardochée fut introduit en présence de l’empereur, car Esther avait révélé quel était son lien de parenté avec elle. 2 Alors l’empereur retira de son doigt l’anneau qu’il avait repris à Haman[ag] et il le donna à Mardochée. Esther le chargea de gérer les biens de Haman. 3 Puis Esther parla de nouveau à l’empereur. Elle se jeta à ses pieds, et le supplia en pleurant de réduire à néant le mal organisé par Haman d’Agag, et les projets qu’il avait formés contre les Juifs. 4 L’empereur tendit le sceptre d’or à Esther. Alors elle se releva et se tint debout devant lui.
5 – Si l’empereur le veut bien, dit-elle, et si vraiment j’ai obtenu sa faveur, si ma demande lui paraît convenable et s’il trouve plaisir en moi, qu’il veuille bien révoquer par écrit les lettres conçues par Haman, fils d’Hammedata l’Agaguite, et qu’il avait rédigées dans le but de faire périr les Juifs qui vivent dans toutes les provinces de l’empire. 6 En effet, comment pourrais-je supporter de voir le malheur s’abattre sur mon peuple ? Oui, comment pourrais-je supporter la vue de la disparition de ma race ?
7 L’empereur Xerxès répondit à l’impératrice Esther et au Juif Mardochée : En ce qui me concerne, j’ai déjà donné à Esther les biens de Haman, et lui, je l’ai fait pendre à la potence parce qu’il voulait porter la main sur les Juifs. 8 Vous, maintenant, rédigez des lettres concernant les Juifs, comme vous le jugerez bon. Ecrivez-les au nom de l’empereur et cachetez-les avec le sceau impérial. En effet, un document rédigé au nom de l’empereur et cacheté avec son sceau est irrévocable[ah].
9 On convoqua les secrétaires impériaux sur-le-champ, le vingt-troisième jour du troisième mois, c’est-à-dire du mois de Sivân. On écrivit aux Juifs, aux satrapes, aux gouverneurs et aux ministres des cent vingt-sept provinces qui s’étendaient de l’Inde à l’Ethiopie, tout ce qu’ordonna Mardochée. On rédigea les lettres avec l’écriture de chaque province et selon la langue de chaque peuple. De même, on écrivit aux Juifs avec leur écriture et dans leur langue. 10 Les lettres furent écrites au nom de l’empereur Xerxès et cachetées avec son sceau, et on les expédia par des courriers montés sur des pur-sang sélectionnés de l’administration impériale[ai].
11 Par cet édit, l’empereur autorisait les Juifs de chaque ville à se regrouper pour défendre leur vie, à massacrer, tuer et exterminer toute bande armée d’un peuple ou d’une province qui les attaquerait, y compris leurs enfants et leurs femmes, et à piller les biens de ces gens. 12 Cette autorisation était valable pour un jour, le treizième jour du douzième mois qui est le mois d’Adar, dans toutes les provinces de l’empereur Xerxès[aj]. 13 Une copie du texte de la lettre devait être promulguée comme ayant force de loi dans chaque province, et portée à la connaissance de toute sa population, afin que les Juifs se tiennent prêts à se faire justice de leurs ennemis ce jour-là.
14 Les courriers montés sur les pur-sang de l’administration impériale partirent à bride abattue, par ordre de l’empereur, tandis que l’édit était immédiatement publié dans la citadelle de Suse. 15 Mardochée sortit de chez l’empereur revêtu d’un habit impérial violet et blanc, et portant une grande couronne d’or et un manteau de byssus et de pourpre. Toute la ville de Suse retentissait de cris de joie et se réjouissait. 16 Pour les Juifs, ce fut un jour lumineux, un jour de bonheur, de joie et de gloire. 17 En chaque province, en chaque ville, et en tout lieu où parvenaient l’ordonnance et l’édit de l’empereur, ce fut pour les Juifs le bonheur et la joie, ainsi qu’une occasion de festin et de fête. Un grand nombre de gens du pays se firent Juifs, tant les Juifs leur inspiraient de crainte.
Le péril des ennemis des Juifs
9 Le treizième jour du douzième mois, c’est-à-dire le mois d’Adar, arriva. C’était le jour où le décret impérial devait être appliqué. En ce jour, les ennemis des Juifs avaient espéré se rendre maîtres d’eux, mais la situation se retourna : ce furent les Juifs qui se rendirent maîtres de leurs ennemis. 2 Dans les villes de toutes les provinces de l’empereur Xerxès où ils habitaient, ils se regroupèrent pour s’en prendre à ceux qui leur voulaient du mal. Personne ne put leur résister, tant la peur qu’ils inspiraient s’était emparée de tout le monde. 3 Tous les ministres des provinces, les satrapes, les gouverneurs et les fonctionnaires impériaux soutinrent les Juifs par crainte de Mardochée. 4 En effet, celui-ci occupait un haut rang au palais impérial, et sa renommée s’était répandue dans toutes les provinces, car il devenait de plus en plus puissant.
5 Ainsi, les Juifs frappèrent tous leurs ennemis de l’épée, ils les tuèrent et les exterminèrent, ou les traitèrent comme ils le jugèrent bon. 6 Dans la seule citadelle de Suse, les Juifs tuèrent et firent périr cinq cents hommes, 7 ainsi que Parshandatha, Dalphôn et Aspata, 8 Porata, Adalia et Aridata, 9 Parmashta, Arizaï, Aridaï et Vayezata, 10 les dix fils de Haman, fils de Hammedata, le persécuteur des Juifs. Mais on s’abstint de tout pillage.
11 Le jour même, l’empereur fut informé du nombre de victimes dans la citadelle de Suse. 12 Il dit à l’impératrice Esther : Dans la seule citadelle de Suse, les Juifs ont tué et fait périr cinq cents hommes ainsi que les dix fils de Haman. Qu’ont-ils dû faire dans les autres provinces de l’empire ! Néanmoins, si tu as encore une requête à formuler, elle te sera accordée. Quelle est ta demande ? Tu l’obtiendras.
13 Esther répondit : Si l’empereur le veut bien, qu’il accorde aux Juifs de Suse la permission d’agir demain comme aujourd’hui, et que l’on pende les corps des dix fils de Haman à la potence.
14 L’empereur donna l’ordre de procéder ainsi. Un nouveau décret fut promulgué à Suse, et les dix fils de Haman furent pendus. 15 Les Juifs de Suse se rassemblèrent donc encore le quatorzième jour du mois d’Adar et tuèrent trois cents hommes, mais sans piller leurs biens.
16 Les autres Juifs disséminés dans les provinces de l’empire se réunirent aussi pour défendre leur vie et garantir leur tranquillité vis-à-vis de leurs ennemis, 17 et le treizième jour du mois d’Adar, ils tuèrent 75 000 de leurs ennemis, mais sans piller leurs biens. Le quatorzième jour du mois, ils cessèrent tout massacre et firent de ce jour un jour de festin et de réjouissances.
18 Par contre les Juifs de Suse qui s’étaient regroupés le treizième et le quatorzième jour, se reposèrent le quinzième, et c’est ce jour-là qu’ils firent des festins et se livrèrent à des réjouissances. 19 C’est ce qui explique pourquoi les Juifs disséminés dans les campagnes et ceux qui habitent des localités des campagnes font du quatorzième jour du mois d’Adar un jour de fête, de réjouissances et de festin, et s’envoient mutuellement des cadeaux ce jour-là.
L’institution de la fête de Pourim
20 Mardochée consigna par écrit le récit de tous ces événements, puis il envoya des lettres à tous les Juifs de toutes les provinces de l’empereur Xerxès, auprès et au loin. 21 Il leur demanda de célébrer tous les ans une fête le quatorzième et le quinzième jour du mois d’Adar, 22 puisqu’en ces jours, les Juifs s’étaient assuré la tranquillité vis-à-vis de leurs ennemis et qu’en ce mois, leur affliction avait été changée en joie et leur deuil en fête. Il les invitait à commémorer ces jours-là par des festins et des réjouissances, et par des échanges mutuels de cadeaux et des dons aux pauvres. 23 Les Juifs suivirent les consignes de Mardochée et firent de cette fête, qu’ils venaient de célébrer, une tradition à respecter tous les ans.
24 Car Haman, fils de Hammedata l’Agaguite, le persécuteur de tous les Juifs, avait résolu de les exterminer. Il avait jeté le Pour – ce qui veut dire « sort » en perse – en vue de leur ruine et de leur extermination. 25 Mais Esther était allée trouver l’empereur qui avait ordonné par écrit de faire retomber sur lui les méchants plans qu’il avait formés contre les Juifs et de le pendre, lui et ses fils, à la potence. 26 C’est pourquoi on a appelé ces jours-là Pourim d’après le mot perse qui signifie « sort ».
Selon les instructions de la lettre de Mardochée et à cause des événements dont ils avaient eux-mêmes été les témoins et qu’ils avaient subis, 27 les Juifs instituèrent la tradition pour eux, pour leurs descendants et pour ceux qui se joindraient à eux, selon laquelle on ne devait pas omettre de célébrer chaque année ces deux jours à la date fixée et de la manière prescrite par Mardochée. 28 Ainsi le souvenir de ces jours est perpétué de génération en génération dans chaque famille, dans chaque province et dans chaque ville, par cette célébration. Les Juifs ne doivent pas cesser de célébrer ces jours des Pourim et leur souvenir ne doit pas se perdre chez leurs descendants.
29 L’impératrice Esther, fille d’Abichaïl, écrivit avec le Juif Mardochée en usant de toute son autorité pour confirmer cette seconde lettre au sujet des Pourim. 30 Ils envoyèrent des lettres contenant des vœux pour une paix véritable à tous les Juifs des cent vingt-sept provinces de l’empire de Xerxès. 31 Elles confirmaient l’institution de ces jours des Pourim à la date fixée, tels que le Juif Mardochée et l’impératrice Esther les avaient institués, et tels que les Juifs les avaient eux-mêmes institués pour eux-mêmes et pour leurs descendants, avec des jeûnes et des supplications. 32 L’ordre d’Esther institua le rituel de cette fête des Pourim, et cela fut consigné dans un livre.
Mardochée, bras droit de l’empereur
10 Par la suite, l’empereur Xerxès imposa un tribut à tout son empire ainsi qu’aux territoires côtiers[ak]. 2 Tous ses actes démontrant sa puissance et sa vaillance, ainsi que la manière dont il éleva Mardochée à un rang important, sont consignés dans le livre des Annales des empereurs des Mèdes et des Perses. 3 Le Juif Mardochée occupa, en effet, le second rang, après l’empereur Xerxès. Il fut très considéré par les Juifs et aimé par tous ses compatriotes, parce qu’il travaillait au bien de son peuple et œuvrait pour la paix de toute sa race[al].
Prologue
Job, un homme intègre et droit
1 Il y avait, au pays d’Outs[am], un homme appelé Job. C’était un homme intègre et droit, un homme qui craignait Dieu et qui évitait de faire le mal. 2 Il avait sept fils et trois filles. 3 De plus, ses troupeaux comptaient : sept mille moutons et chèvres, trois mille chameaux, cinq cents paires de bœufs, et cinq cents ânesses. Il possédait aussi des serviteurs en très grand nombre. Cet homme était le personnage le plus important des régions de l’est du Jourdain. 4 Or, chacun de ses fils recevait à tour de rôle ses frères pour un festin. Ils invitaient leurs trois sœurs à manger et à boire avec eux. 5 Quand ces jours de festin étaient achevés, Job faisait venir ses enfants, afin d’accomplir pour eux les rites de purification. Il se levait de grand matin et offrait un holocauste[an] pour chacun d’eux. Car il se disait : Peut-être mes fils ont-ils commis quelque faute et dit du mal de Dieu dans leur cœur.
Job agissait toujours ainsi.
Job perd tout
6 Or, un jour, les anges de Dieu[ao] se rendirent au conseil de l’Eternel. L’Accusateur (Satan)[ap] vint aussi parmi eux. 7 L’Eternel dit à l’Accusateur : D’où viens-tu donc ?
Celui-ci lui répondit : Je viens de parcourir la terre et de la sillonner.
8 Alors l’Eternel demanda à l’Accusateur : As-tu remarqué mon serviteur Job ? Il n’y a personne comme lui sur la terre : c’est un homme intègre et droit, un homme qui craint Dieu et qui évite de mal faire.
9 L’Accusateur lui répondit : Est-ce vraiment pour rien que Job craint Dieu ? 10 N’as-tu pas élevé comme un rempart de protection autour de lui, autour de sa maison, et autour de tous ses biens ? Tu as fait réussir ses entreprises : ses troupeaux se sont multipliés dans le pays ! 11 Mais porte donc la main sur tous ses biens et sur les siens, et l’on verra s’il ne te maudit pas en face.
12 Alors l’Eternel dit à l’Accusateur : Tous ses biens sont en ton pouvoir, ainsi que les siens, mais ne porte pas la main sur sa personne !
Alors l’Accusateur se retira de la présence de l’Eternel.
13 Or, un jour, les fils et les filles de Job s’étaient mis à manger et à boire du vin ensemble chez leur frère aîné. 14 C’est alors qu’un messager vint trouver Job et lui annonça : Les bœufs étaient en train de labourer, et les ânesses paissaient à leurs côtés, 15 quand les Sabéens[aq] se sont jetés sur eux, et s’en sont emparés. Ils ont massacré tes serviteurs. Je suis le seul qui ait pu leur échapper et je viens t’annoncer la nouvelle.
16 Il n’avait pas fini de parler qu’un autre messager arriva et annonça : La foudre est tombée du ciel, et elle a foudroyé tes moutons et tes chèvres et tes serviteurs. Elle a tout consumé. Je suis le seul qui ait pu y échapper et je viens t’annoncer la nouvelle.
17 Il parlait encore, lorsqu’un autre messager arriva et annonça : Trois bandes de Chaldéens[ar] se sont jetées sur les chameaux, et s’en sont emparés. Ils ont massacré tes serviteurs. Je suis le seul qui ait pu leur échapper et je viens t’annoncer la nouvelle.
18 Il parlait encore, lorsqu’un autre messager arriva et annonça : Tes fils et tes filles étaient en train de manger et de boire du vin ensemble chez leur frère aîné, 19 lorsqu’un vent très violent s’est levé du côté du désert. Il s’est rué contre les quatre coins de la maison qui s’est effondrée sur tes enfants. Ils sont tous morts. Je suis le seul qui ait pu m’échapper et je viens t’annoncer la nouvelle.
20 Alors Job se leva, il déchira son manteau, se rasa la tête[as], puis se jeta par terre pour se prosterner. 21 Et il dit : Je suis sorti nu du ventre de ma mère, et j’y retournerai nu. L’Eternel a donné, l’Eternel a repris : que l’Eternel soit béni !
22 Au milieu de tous ces malheurs, Job ne commit pas de péché et n’attribua rien d’inconvenant à Dieu[at].
Les souffrances de Job
2 Un autre jour, les anges[au] se rendirent au conseil de Dieu. L’Accusateur (Satan) vint aussi parmi eux au conseil de l’Eternel.
2 L’Eternel dit à l’Accusateur : D’où viens-tu donc ?
Celui-ci lui répondit : Je viens de parcourir la terre et de la sillonner.
3 Alors l’Eternel demanda à l’Accusateur : As-tu remarqué mon serviteur Job ? Il n’y a personne comme lui sur la terre : c’est un homme intègre et droit, un homme qui craint Dieu et qui évite de mal faire. Il persévère toujours dans son intégrité. C’est pour rien que tu m’as incité à l’accabler.
4 L’Accusateur lui répondit : Peau pour peau, tout ce qui est à lui, l’homme y renoncera en échange de sa vie. 5 Mais porte donc la main sur son corps et l’on verra s’il ne te maudit pas en face !
6 Alors l’Eternel dit à l’Accusateur : Il est en ton pouvoir, mais épargne sa vie.
7 Alors l’Accusateur se retira de la présence de l’Eternel et il infligea à Job une douloureuse maladie de peau qui s’étendit de la plante des pieds jusqu’au crâne.
8 Job prit un morceau de poterie pour se gratter, et resta assis au milieu de la cendre.
9 Sa femme lui dit : Tu persévères toujours dans ton intégrité ! Maudis donc Dieu et meurs !
10 Mais il lui répondit : Tu parles comme une insensée. Quoi ! nous recevrions de Dieu le bonheur, et nous ne recevrions pas aussi le malheur !
Au milieu de tous ces malheurs, Job ne commit pas de péché dans tout ce qu’il dit.
Les trois amis de Job
11 Or, trois amis de Job apprirent que tous ces malheurs venaient de fondre sur lui. Ils vinrent chacun de son pays. C’était Eliphaz de Témân[av], Bildad de Shouah[aw], et Tsophar de Naama[ax]. En effet, ils décidèrent ensemble d’aller lui témoigner leur sympathie et le consoler. 12 Lorsqu’ils l’aperçurent de loin, ils ne le reconnurent pas, et ils se mirent à pleurer à grand bruit. Ils déchirèrent leur manteau et jetèrent de la poussière en l’air, au-dessus de leur tête. 13 Puis ils restèrent là, assis par terre, à ses côtés, sept jours et sept nuits. Aucun d’eux ne lui dit un mot car ils voyaient bien combien sa souffrance était grande.
Discours de Job et de ses trois amis
Job maudit le jour de sa naissance
3 Après cela, Job prit la parole et se mit à maudire le jour de sa naissance[ay]. 2 Il parla en ces termes :
3 Que périsse le jour |où je fus enfanté
et la nuit qui a dit : |« Un garçon est conçu ! »
4 Ce jour, |qu’il se change en ténèbres,
que Dieu là-haut |ne s’en occupe plus,
oui, que nulle clarté |ne rayonne sur lui !
5 Qu’une profonde obscurité, |et d’épaisses ténèbres, |le réclament pour elles !
Que des nuées pèsent sur lui,
que des éclipses de soleil[az] |le chargent d’épouvante !
6 Oh ! que l’obscurité |saisisse cette nuit,
qu’elle n’ait pas sa place |au milieu des jours de l’année
et qu’elle n’entre point |dans le compte des mois !
7 Que cette nuit-là soit stérile
et que nul cri de joie |n’y résonne jamais.
8 Oui, que cette nuit-là |fasse l’objet d’incantations |de ceux qui maudissent les jours
et savent réveiller |le grand monstre marin[ba] !
9 Que les ténèbres masquent |ses astres du matin !
Oui, qu’elle attende en vain |la lumière du jour
et qu’elle ne voie pas |l’aurore s’éveiller,
10 pour n’avoir pas fermé |le ventre maternel
et n’avoir pas caché |le malheur à mes yeux !
11 Pourquoi ne suis-je donc pas mort |dans le sein de ma mère ?
Pourquoi n’ai-je pas expiré |en sortant de ses flancs ?
12 Pourquoi ai-je trouvé |deux genoux accueillants
et une mère |pour me donner le sein ?
13 Car maintenant |je serais couché, et tranquille,
je dormirais |je me reposerais
14 en compagnie des rois |et des grands de la terre
qui s’étaient fait bâtir |de vastes monuments |dont il ne reste que des ruines,
15 avec les chefs des princes, |ceux qui détenaient l’or
et entassaient l’argent |dans leurs demeures.
16 Je n’existerais pas |tel l’avorton |enfoui sous terre,
tel un enfant |qui n’a pas vu le jour.
17 Là, ceux qui sont méchants |cessent de tourmenter,
et ceux qui sont à bout de forces |peuvent se reposer.
18 Les prisonniers, de même, |se trouvent là paisibles
car ils n’entendent plus |la voix de l’oppresseur,
19 petits et grands sont là,
et de son maître |l’esclave est affranchi.
20 Pourquoi, oui, pourquoi donc |donne-t-il la lumière |à ceux qui souffrent ?
Pourquoi donner la vie |aux hommes accablés ?
21 Ils attendent la mort |et elle ne vient pas,
alors qu’ils la recherchent |plus que tous les trésors,
22 ils seraient pleins de joie |et ils jubileraient
s’ils trouvaient le tombeau.
23 Pourquoi donner la vie |à l’homme qui ne voit |aucune route à suivre
parce que Dieu lui-même |le cerne de tous les côtés ?
24 Car mes gémissements |ont remplacé mon pain
et mes cris de douleur |déferlent comme l’eau.
25 Tout ce que je redoute, |c’est cela qui m’arrive,
les maux que je craignais |ont tous fondu sur moi.
26 Je n’ai plus de tranquillité, |pas de relâche, |pas de repos.
Je suis sans cesse en proie |à de nouveaux tourments.
Premier discours d’Éliphaz
Personne n’est innocent
4 Alors Eliphaz de Témân prit la parole et dit :
2 Peut-on risquer un mot ? |Tu es si abattu[bb] !
Mais qui peut garder le silence ?
3 Tu as instruit beaucoup de gens
et tu as fortifié |ceux qui baissaient les bras.
4 Tes propos relevaient |celui qui trébuchait,
et tu raffermissais |ceux dont les genoux fléchissaient.
5 Maintenant qu’il s’agit de toi, |tu es découragé !
Maintenant que cela te touche, |te voilà tout désemparé !
6 La crainte que tu as de Dieu n’est-elle pas |la source de ton assurance ?
Et ton intégrité |n’est-elle pas ton espérance ?
7 Cherche dans ta mémoire : |quel est donc l’innocent |qui jamais a péri ?
Où sont les hommes droits |qui ont été anéantis ?
8 D’après ce que j’ai vu, |les artisans d’iniquité
et ceux qui sèment le malheur |en moissonnent les fruits :
9 sous le souffle de Dieu, |les voilà qui périssent,
dans son courroux, il les consume.
10 Le lion a beau rugir |et le fauve gronder,
ils sont brisés, les crocs des lionceaux.
11 Le lion périt faute de proie,
les petits de la lionne |sont dispersés.
12 Un oracle furtif |s’est glissé jusqu’à moi,
et mon oreille en a saisi |le murmure léger :
13 pendant les visions de la nuit, |au milieu d’un flot de pensées,
à l’heure où un profond sommeil |s’empare des humains,
14 un frisson d’épouvante |a parcouru mon corps,
tous mes os en tremblèrent.
15 Un esprit effleura ma face,
hérissant les poils sur ma peau.
16 Il se tenait debout. |Je ne pus reconnaître |à quoi il ressemblait,
mais cette apparition |resta devant mes yeux.
J’entendis une voix |qui murmurait tout doucement :
17 « Un humain serait-il |plus juste que son Créateur ?
Un homme peut-il être |plus pur que Dieu ?
18 Si, en ses propres serviteurs |Dieu ne peut se fier,
et si même en ses anges |il trouve des défauts,
19 à plus forte raison |il ne peut se fier |aux pauvres créatures |habitant dans des corps d’argile,
qui ne sont que poussière[bc]
et qu’on peut écraser |comme des vermisseaux.
20 Entre le matin et le soir, |ils sont réduits en poudre.
Sans qu’on y prenne garde, |les voilà qui périssent.
21 Les cordes qui tenaient leur tente |sont soudain arrachées,
et c’est ainsi qu’ils meurent |sans avoir acquis la sagesse. »
Dieu rend le bonheur à qui s’adresse à lui
5 Maintenant donc, appelle, |pour voir si quelqu’un te répond.
A quel saint ange[bd] t’adresseras-tu ?
2 Car c’est l’emportement |qui tue un insensé,
c’est la colère |qui fait périr le sot.
3 Sans doute, j’ai vu l’insensé |étendre ses racines,
mais j’ai soudain maudit |son lieu d’habitation[be] :
4 « Que ses fils soient privés |de tout soutien,
écrasés en justice[bf], |sans personne pour les sauver.
5 Ce qu’il a moissonné, |qu’un affamé le mange
et vienne l’enlever |jusque dans les épines ;
oui, que des gens avides |engouffrent sa fortune ! »
6 Le malheur, en effet, |ne sort pas de la terre
et la misère |ne germe pas du sol,
7 car l’homme naît pour la souffrance
comme les étincelles |s’élèvent pour voler.
8 Pour moi, j’aurais recours à Dieu.
Oui, c’est à Dieu |que je présenterais ma cause.
9 Il fait de grandes choses |qu’on ne saurait comprendre
et des prodiges innombrables.
10 C’est lui qui fait tomber la pluie |sur la surface de la terre
et qui répand les eaux |à travers les campagnes.
11 Ceux qui sont abaissés, |bien haut il les élève,
ceux qui sont affligés |trouvent la délivrance.
12 Il déjoue les intrigues |des plus rusés
de sorte que leur main |ne peut assurer leur salut.
13 Il attrape les sages |au piège de leur propre ruse[bg],
et les projets des plus perfides |il les prend de vitesse.
14 En plein jour, ils rencontrent |de profondes ténèbres,
à midi, ils tâtonnent |comme à la nuit tombée.
15 Il arrache le pauvre |de l’épée de leur bouche,
il sauve l’indigent |de la main du puissant.
16 Ainsi le miséreux |a de quoi espérer,
et la perversité |a la bouche fermée.
17 Ah ! certes, bienheureux |celui que Dieu corrige,
qui n’a pas de mépris |pour les leçons du Tout-Puissant[bh].
18 Car Dieu inflige la blessure, |mais il la panse aussi
et même s’il meurtrit, |sa main guérit ensuite.
19 Six fois, dans la détresse, |il te délivrera.
Dans sept calamités, |le mal t’épargnera.
20 Au temps de la famine, |il te gardera de la mort
au milieu du combat, |il te préservera du glaive.
21 Tu seras à l’abri |du fouet de la langue
et tu ne craindras pas |le désastre à venir.
22 Tu pourras te moquer |de la dévastation |comme de la disette,
et tu n’auras pas peur |des animaux sauvages.
23 Un pacte te liera |aux pierres de la terre,
et quant aux animaux sauvages, |ils seront en paix avec toi.
24 Tu verras le bonheur |régner dans ta demeure.
Quand tu visiteras |tes troupeaux au bercail[bi], |rien n’y fera défaut.
25 Tu pourras constater |combien ta descendance |sera nombreuse
et ta progéniture |poussera comme l’herbe.
26 Tu entreras dans le sépulcre |dans la mûre vieillesse[bj]
comme un tas de gerbes qu’on dresse |à la saison voulue.
27 Oui, nous l’avons examiné : |cela est bien ainsi.
Ecoute donc ces choses, |et fais-en ton profit.
Réponse de Job à Éliphaz
Job se sent trahi par ses amis
6 Job prit la parole et dit :
2 Ah ! si mon affliction |pouvait être pesée
et s’il était possible |de mettre toute ma misère |sur les plateaux d’une balance,
3 assurément mon malheur |est plus pesant |que le sable des mers,
c’est pourquoi mes paroles |dépassent la mesure.
4 Car les flèches du Tout-Puissant |sont plantées dans mon être
et mon esprit boit leur poison[bk],
oui, je suis assailli |par les terreurs que Dieu m’envoie.
5 Un âne se met-il à braire |pendant qu’il broute l’herbe tendre ?
Un bœuf se met-il à mugir |quand il est devant son fourrage ?
6 Un repas fade et insipide |se mange-t-il sans sel ?
Peut-on trouver de la saveur |dans le blanc d’œuf ?
7 Ce qu’autrefois je refusais |est devenu ma nourriture.
C’est là mon pain, |même s’il me répugne[bl].
8 Ah ! qui fera |aboutir ma requête !
Que Dieu m’accorde |ce que j’espère !
9 Que Dieu consente |à m’écraser !
Qu’il laisse aller sa main |et me détruise.
10 J’aurai du moins un réconfort,
et je tressaillirai de joie |au sein de tourments implacables,
car je n’aurai trahi |aucun des ordres du Dieu saint.
11 Pourquoi espérerais-je |quand je n’ai plus de force ?
A quoi bon vivre encore |vu la fin qui m’attend ?
12 Du roc ai-je la résistance ?
Mon corps est-il de bronze ?
13 Et puiserai-je encore en moi |des ressources pour m’en sortir ?
Toute aide m’est ôtée.
14 L’homme désespéré |a droit à de la compassion |de la part d’un ami,
oui, même s’il cessait[bm] de craindre |le Tout-Puissant.
15 Mes amis m’ont trahi |comme un torrent,
comme un de ces cours d’eau |dont le lit est à sec.
16 Lorsque la glace fond |et que les neiges |s’engloutissent en eux,
ils charrient des eaux troubles.
17 Mais à la saison sèche, |leurs cours tarissent.
Quand viennent les chaleurs, |ils s’éteignent sur place.
18 Pour eux, les caravanes |dévient de leur chemin,
elles vont s’enfoncer |loin dans les solitudes, |et elles y périssent.
19 Les caravanes de Téma[bn] |les cherchent du regard,
les convois de Saba[bo] |comptent sur eux.
20 Mais ils sont pleins de honte |d’avoir mis leur espoir en eux :
arrivés jusqu’à eux |ils étaient tout penauds.
21 C’est là ce que vous êtes |pour moi en ce moment :
en voyant mon malheur, |vous êtes pris de peur !
22 Et pourquoi donc ? |Vous ai-je dit : |« Donnez-moi de vos biens
et, de votre fortune, |payez une rançon,
23 pour me faire échapper |aux mains de l’adversaire
et pour me délivrer |du pouvoir des tyrans » ?
24 Faites-le-moi savoir |et moi je me tairai.
En quoi ai-je failli ? |Faites-le-moi comprendre !
25 Ah ! Combien seraient efficaces |des discours équitables !
Mais à quoi servent vos critiques ?
26 Avez-vous l’intention |de blâmer de simples paroles,
des mots jetés au vent |par un désespéré[bp] ?
27 Sur un orphelin même, |vous iriez vous ruer
et feriez bon marché |de votre ami intime.
28 Mais, veuillez cependant |me regarder en face :
vous mentirais-je effrontément ?
29 Revenez en arrière, |ne soyez pas perfides.
Oui, revenez encore, |car c’est mon innocence |qui est en cause.
30 Y a-t-il dans ma bouche |de la perversité ?
Mon palais ne sait-il |plus discerner le mal ?
Pourquoi la souffrance ?
7 Le sort de l’homme sur la terre |est celui d’un soldat
et ses jours sont semblables |à ceux d’un mercenaire.
2 Il est comme un esclave |qui soupire après l’ombre[bq]
et comme un ouvrier |qui attend son salaire.
3 J’ai reçu en partage |des mois de déception,
j’ai trouvé dans mon lot |des nuits de peine amère.
4 Dès que je suis couché, je dis : |« Quand vais-je me lever ? »
Sitôt levé, je pense : |« Quand donc viendra le soir[br] ? »
Et, jusqu’au crépuscule, |je suis agité de douleurs.
5 Mon corps est couvert de vermine |et de croûtes terreuses,
ma peau s’est crevassée, |partout, mes plaies suppurent.
6 Mes jours se sont enfuis |plus rapides que la navette |d’un tisserand habile.
Ils tirent à leur fin |sans qu’il y ait d’espoir.
7 Rappelle-toi, ô Dieu, |que ma vie n’est qu’un souffle
et que jamais mes yeux |ne reverront plus le bonheur.
8 Oui, l’œil qui me regarde |ne pourra plus me voir,
tes yeux me chercheront |et j’aurai disparu.
9 Tout comme une nuée |qui se dissipe et passe,
l’homme va dans la tombe[bs] |pour n’en plus remonter.
10 Il ne reviendra plus |dans sa maison
et sa demeure même |ne le reconnaît plus.
11 C’est pourquoi je ne veux |plus réfréner ma langue,
je parlerai |dans ma détresse,
je me lamenterai |car mon cœur est amer.
12 Suis-je donc une mer |ou un monstre marin
pour que tu établisses |contre moi, une garde[bt] ?
13 Si je me dis : |« Mon lit m’apaisera,
ma couche m’aidera |à porter ma douleur »,
14 alors tu m’épouvantes |par d’affreux cauchemars
et tu me terrifies |par des visions nocturnes.
15 J’aimerais mieux être étranglé,
la mort vaudrait bien mieux |que vivre dans ces os.
16 Je suis plein de dégoût ! |Je ne durerai pas toujours.
Laisse-moi donc tranquille : |ma vie est si fragile.
17 Qu’est-ce que l’homme, |pour que tu fasses |un si grand cas de lui,
et pour que tu lui prêtes |une telle attention,
18 pour que tu l’examines |matin après matin,
et pour qu’à chaque instant |tu viennes l’éprouver ?
19 Quand détourneras-tu |enfin tes yeux de moi ?
Ne lâcheras-tu pas |un instant ton étreinte, |ne fût-ce que le temps |d’avaler ma salive ?
20 Et puis même si j’ai péché, |que t’ai-je fait, à toi, |censeur des hommes ?
Pourquoi donc m’as-tu pris pour cible ?
Suis-je devenu une charge[bu] ?
21 Pourquoi ne veux-tu pas |pardonner mon offense
et ne passes-tu pas |sur mon iniquité ?
Bientôt j’irai dormir |au sein de la poussière
et tu me chercheras, |mais je ne serai plus.
La Bible Du Semeur (The Bible of the Sower) Copyright © 1992, 1999 by Biblica, Inc.®
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